Les Visionnaires
Bien que la littérature se trouve à l’heure contemporaine dans une visée plus quantitative que qualitative, je suis sûre qu’elle reste un moteur dans notre humanité, qu’elle est la servante de cette nécessité du conte, de transmission d’une culture humaine. Elle est l’héritière d’une tradition orale qui servait à transmettre les légendes, les contes. Conter c’est transmettre en un acte intemporel, multidimensionnel, qui construit et reconstruit le tissu social. C’est donc par elle que je vais passer pour expliciter la notion de visionnaire.
Qu’est-ce qu’un Visionnaire ?
C’est un individu qui maîtrise un système dans son intégralité, et qui a les capacités à garder son ouverture d’esprit et d’initiative pour pouvoir imaginer des solutions viables. Pour se faire, il passe par 5 phases : la connaissance, l’incubation, l’intuition, la vérification, et l’innovation.
Un exemple : Georges Orwell (1903-1950), auteur britannique du célèbre roman « 1984 ». Nous pouvons diviser son œuvre en trois parties : anticolonialisme (une histoire birmane) ; antilibéralisme (dans la dèche de Paris à Londres) ; antimarxisme (la ferme des animaux)
1984 : dessine un monde totalitaire dans lequel les idéologies ont triomphé de l’individu, à l’aide de la novlangue et de l’inversion des valeurs. Karl Jaspers définit une idéologie comme « un complexe d’idées ou de représentations qui passe aux yeux du sujet pour une interprétation du monde ou de sa propre situation, qui lui représente la vérité absolue, mais sous la forme d’une illusion par quoi il se justifie, se dissimule, se dérobe d’une façon ou d’une autre, mais pour son avantage immédiat ».
Son ouvrage est vu comme intemporel, ce qui est le propre d’une œuvre d’art. Toutefois, il reste particulièrement significatif aujourd’hui, tant les points communs avec notre société contemporaine devraient nous mettre en alerte. « De même que la science ne peut constituer une menace en soi, elle ne peut, non plus, constituer une solution. Dans la mesure où l’idéologie ferait partie d’une forme de culture, notre problème serait d’ordre culturel. Pour pouvoir résoudre ce problème, il nous faut pouvoir communiquer ensemble. Dans ce sens, l’adoption d’une langue auxiliaire universelle partagée par toute l’humanité, en plus de la langue maternelle de tout un chacun, peut énormément aider à augmenter les échanges entre les diverses parties de l’humanité. Il s’agirait d’une langue avec des effets opposés à celui de la novlangue de 1984. La seconde étape consiste en la « définition » des concepts : démocratie, liberté, esclavage, savoir, ignorance, etc. Cette définition universelle et commune nous libérera du multiculturalisme, qui est l’un des maux les plus puissants de notre temps et qui bénéficie d’un appui des partisans du « politiquement correct ». Derrière ce concept trompeur, se cachent une hétérogénéité des définitions des concepts d’une part, et une impossibilité de coïncidence des cultures différentes d’autre part. »
Pour lire l’intégralité de l’analyse du roman : http://www.crsdd.uqam.ca/pages/docs/R%C3%A9sum%C3%A9FicheLecture1984_FINAL.pdf

Cette critique contemporaine est prise à son propre jeu : celui d’une pensée anglo-saxonne dominante, qui tend à vouloir être expansionniste, car 1984 se retrouve cité comme une justification du « globish » et de l’émergence d’un ordre mondial qui mettrait toutes les cultures d’accord, en prônant une réalité commune et absolue qui voudrait effacer la notion de vérité.
Car la vérité est par définition absolue, commune. Elle permet de dépasser la seule intimité de notre réalité vécue à échelle individuelle. La vérité peut être ressentie intimement, mais il faut pour cela partir dans une quête profonde et intime et partir de cette expérience touchée à l’universel, absolue de la vérité. Cela est bien évidemment au-delà des capacités humaines, car un individu ne peut gérer un contact plus ou moins proche (c’est-à-dire un contact où il peut faire preuve de confiance à autrui sans besoin d’une hiérarchie) qu’avec un nombre restreint d’individus (entre 100 et 230 avec une valeur pratique de 150, communément appelé « nombre Dunbar »), cela dans un rayon d’environ une centaine de km autour de lui. De plus, la langue elle-même se transforme à partir de 1 000 individus. Il est donc impossible de faire une planète à l’image d’une culture, cela serait nier l’impact de l’environnement et du paysage, très diversifiés à travers le monde, qui forment des habitudes, des pensées, et donc une culture propre.
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